Les foncières commerciales peineront à résister durablement au confinement - DJ Plus
01 Aprile 2020 - 9:21AM
Bourse Web Dow Jones (French)
François Berthon,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Les sociétés immobilières et foncières
européennes cotées subissent de lourds dégagements en Bourse depuis
le début de la crise du Covid-19. L'indice Stoxx Europe 600 Real
Estate a perdu 33% depuis la mi-février.
Au sein du secteur, le sous-indice des foncières commerciales a
chuté dans le même temps de 52%. En un mois et demi,
Unibail-Rodamco-Westfield (URW), le leader de l'immobilier
commercial en Europe, également présent aux Etats-Unis depuis le
rachat de Westfield en 2018, a vu son titre plonger de 61%.
Toutes les branches de l'immobilier ne sont pas logées à la même
enseigne. "Les actifs de bureaux sont relativement immunisés contre
la crise", notent les analystes de Deutsche Bank, du moins si la
situation ne s'éternise pas.
De leur côté, les gestionnaires des murs de locaux commerciaux se
trouvent en première ligne face aux mesures de confinement décidées
par les gouvernements pour freiner la propagation de la pandémie.
La fermeture des commerces "non essentiels" implique des pertes
totales de chiffre d'affaires pour les magasins concernés situés en
galeries marchandes.
Vers un recul significatif des loyers perçus en 2020
Pour le secteur en Europe continentale et au Royaume-Uni, les
analystes de Deutsche Bank estiment le recul des loyers perçus par
les gestionnaires entre 10% à 13% sur l'ensemble de l'année. Des
prévisions basées sur des fermetures qui dureraient au moins un
trimestre.
Si cette crise "n'entraîne pas un basculement radical [et durable]
des modes de consommation vers le commerce en ligne, les
perspectives de trésorerie à long terme devraient demeurer
relativement intactes", tempère Morningstar. "Si l'épidémie se
prolongeait et conduisait à des faillites, la diminution des taux
d'occupation prendrait du temps à récupérer, ce qui aurait un
impact important à court et moyen terme", prévient toutefois
l'agence.
En attendant, les propriétaires de murs amortissent déjà une partie
du choc. En France, le Conseil national des centres commerciaux
(CNCC) a annoncé "la suspension de la mise en recouvrement des
loyers et des charges du mois d'avril, en particulier et en
priorité au bénéfice des plus petites entreprises, dans l'attente
des décisions qui seront prises par le gouvernement après le 15
avril".
"Même si l'interruption d'activité ne dure que quelques semaines,
nous prévoyons un nombre croissant d'insolvabilités de locataires
et une activité de location réduite qui se traduiront par une
baisse modérée des loyers nets tout au long de 2020 et 2021",
prévient Moody's. L'agence a récemment abaissé sa notation sur URW,
de même que son homologue Standard & Poor's.
Bien qu'une part très importante des loyers bruts des grands
foncières commerciales soit constituée de loyers minima garantis,
"une baisse prolongée, aggravée et généralisée du chiffre
d'affaires des commerçants pourrait détériorer leur solvabilité et
donc la capacité du groupe à recouvrer une partie de ses loyers", a
reconnu de son côté Klépierre. A ce stade, l'entreprise n'a pas
touché à ses prévisions ni à son dividende, jugeant qu'il n'était
pas possible pour l'instant de mesurer l'impact de cette situation
exceptionnelle sur le cash-flow net courant par action du groupe
pour 2020.
De fortes incertitudes sur les dividendes
Au contraire, Unibail-Rodamco-Westfield a renoncé à ses objectifs
financiers et supprimé la moitié de son dividende 2019 "pour
préserver ses liquidités". "Depuis l'acquisition de Westfield en
juin 2018, URW est dans une phase de désendettement et de
rationalisation de son portefeuille", note Oddo BHF, pour qui le
choix de réduire le dividende de 50% est néanmoins "très
prudent".
Selon l'analyste, "d'autres foncières [commerciales] pourraient
faire un choix similaire de réduire leur dividende", en particulier
celles qui ont un taux d'endettement élevé, telles que Carmila ou
Mercialys.
Compte tenu d'un patrimoine de galeries commerciales localisé en
France, en Italie et en Espagne, Carmila se retrouve
particulièrement exposé à cette crise, ce qui vient d'inciter
Standard & Poor's à abaisser sa perspective sur la note de la
foncière de "stable" à "négative". Malgré les liens historiques
entre les deux groupes, Carmila n'est pas propriétaire des
hypermarchés Carrefour attenants à ses galeries.
Le cas de Mercialys diffère légèrement dans la mesure où la
foncière de Casino était propriétaire des murs de la grande surface
alimentaire dans 24 de ses 47 centres commerciaux à la fin décembre
2019. Mais la résilience du patrimoine de l'entreprise dans le
contexte actuel n'occulte pas sa relation toujours compliquée avec
son premier actionnaire.
Le secteur des foncières commerciales dans son ensemble est donc
dans l'expectative, guettant comme tout le monde l'inflexion de la
courbe de propagation du nouveau coronavirus, dont dépendra la
future levée des mesures de confinement.
-François Berthon, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 93;
fberthon@agefi.fr ed: ECH
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